1984

Film 1954 | Fantascienza 120 min.

Regia di Rudolph Cartier. Un film con Peter Cushing, André Morell, Donald Pleasence, Yvonne Mitchell, Arnold Diamond. Cast completo Genere Fantascienza - Gran Bretagna, 1954, durata 120 minuti.

Condividi

Aggiungi 1984 tra i tuoi film preferiti
Riceverai un avviso quando il film sarà disponibile nella tua città, disponibile in Streaming e Dvd oppure trasmesso in TV.



Accedi o registrati per aggiungere il film tra i tuoi preferiti.


oppure

Accedi o registrati per aggiungere il film tra i tuoi preferiti.

Consigliato assolutamente no!
n.d.
MYMOVIES
CRITICA
PUBBLICO 4,00
CONSIGLIATO N.D.
Serge Daney
Serge Daney

Voilà que sous nos yeux, le classique d'Orwell devient un monument classé. La visite guidée est décevante. Michael Radford est-il un cinéaste académique? Et d'ailleurs, c'est quoi l'académisme?

Quoi de plus ambigu qu'une fidélité outrée? Celle de Michael Radford à 1984 (le livre) plaira sans doute aux fans d'Orwell. Elle est, en effet, littérale. Pourtant, à leur place, je serais vaguement inquiet. Je me demanderais ce qui a motivé - au fond - Radford et Simon Perry (son producteur). L'envie d'adapter un classique de la littérature anglaise (“obligatoire dans les écoles”, dit Radford qui le lut à quinze ans)? La tentation de “faire un coup” (bienvenu dans le nouveau “jeune cinéma anglais” des années quatre-vingt)? Les deux, sans doute. Mais avant tout, le désir de tourner 1984 en 1984. De boucler la boucle. De le faire cette année ou jamais. De retourner le livre à l'auteur-envoyeur, comme un boomerang pieux, avec accusé de réception.
D'emblée, une chose est claire. Radford fait tout sauf une “lecture” du livre d'Orwell (et une “relecture” encore moins). Il n'éclaire aucun passé à la lumière du présent, aucun présent à la lumière du passé. Il ne part pas de la constatation que le Londres de 1984 - même tasseux - n'est pas l'Océania de Big Brother (Thatcher n'est même pas une “Big Sister”). Il ne fait pas le tri entre ce qui s'est réalisé ou non du cauchemar orwellien. Du présent, une seule chose l'intéresse: nous sommes en 1984, enfin, et il est possible de reconduire la vieille utopie déprimante à la frontière du passé qui l'a vu naître. En imaginant en 1984 la vision qu'Orwell eut en 1948 de 1984, Radford glisse (mais le sait-il?) de la reconstitution scrupuleuse au désaveu implicite. Tel est le paradoxe de la fidélité aveugle: avec 1984 - le film, nous en avons fini avec 1984 - le livre. En 1985, tel le yaourt, le film n'aurait été ni frais ni à faire, immangeable et périmé.
Reste, quand la lettre est morte, la fidélité “à l'esprit”. Car avant d'être une extrapolation-SF, 1984 est un document, Eric Arthur Blair (plus connu sous son pseudo d'Orwell) fut d'abord un grand journaliste. Bien placé pour tenter - à chaud - l'un des premiers portraits-robots de ce qu'on n'appelait pas encore le “totalitarisme”, mais qui n'en existait pas moins, déjà, entre autres au pays du “petit père des peuples” (Le Zéro et l'Infini date de 1940). Une véritable fidélité à l'esprit d'Orwell impliquerait ce même talent de journaliste, aujourd'hui. Or, imaginons-nous le visage d'un totalitarisme d'aujourd'hui avec d'autres traits que ceux qu'Orwell a rendus à jamais populaires? Il ne me semble pas (et ce manque d'imagination - le nôtre, celui de Radford - ne laisse pas d'être inquiétant).
Orwell était contemporain d'une “bête immonde” (Brecht dixit) qui n'avait pas encore de nom. Grâce à lui, nous sommes contemporains du nom (“totalitarisme”) dont nous avons baptisé la bête en question. Des tonnes ont été écrites (de Hannah Arendt à Daniel Sibony), des deuils entrepris (de Syberberg à Tarkovski), une description de la paranoïa dans les sociétés industrielles existe et il y a même une façon (confortable) de jouer au “hou fais-moi peur!” rétrospectif avec l'image officiellement haïssable de Djougachvili et de quelques autres. Mais le nom n'est pas la chose et Radford est honnête, en un sens, de renvoyer sagement la copie d'Orwell avec des illustrations dans les marges. Lui non plus n'imagine pas en 1984 un autre visage du totalitarisme que celui qu'Orwell lui prêtait en 1948. Ce visage lui fait encore peur, certes, mais il lui suffit. Ainsi vont les rites de la bonne conscience. D'où le malaise. Comme si on nous montrait avec insistance la photo ancienne et jaunie d'un criminel que nous ne serions pas sûrs de reconnaître sous son déguisement actuel.
Ici, j'imagine que le lecteur exige d'en savoir un peu plus sur la forme du film de Radford. Le lecteur a ce droit. Mais lorsque j'aurai dit que 1984 est accablant d'académisme, je n'aurai fait que répéter la même chose (voir supra) avec d'autres mots. Car qu'est-ce que l'académisme, enfin? N'est-ce qu'un style, un défaut, un manque? Non, l'académisme, c'est l'esthétique du nihilisme (et le refuge des non-dupes professionnels). Cela n'a rien à voir, on s'en doute, avec l'optimisme et le pessimisme. Orwell croyait à la nécessité de dire qu'il n'y avait peut-être pas d'espoir. Radford “croit” à la nécessité de dire qu'Orwell le disait. Nuance. L'académisme (oui, celui-là même qui revient de partout et qui nous donne le sale sentiment d'un retour aux “cinémas de qualité” des années cinquante) n'est jamais que le sérieux désabusé avec lequel on adopte la forme la plus traditionnelle et la plus usée pour signifier par là qu'aucun contenu ne mérite d'être travaillé par le souci d'une forme nouvelle. C'est une démission certes, mais quant au fond aussi.
Entre ces deux entités qu'il s'en voudrait de bousculer (le “grand livre” à adapter et le “grand public” à édifier), l'académisme maintient la distance (comme on dit “garder ses distances”). Le public est seulement pris à témoin d'une opération impeccable qui le concerne vaguement mais ne l'implique jamais. Nous ne “voyons” pas 1984, nous tournons sans mot dire les pages d'un album sinistre. Glacées, mais juste ce qu'il faut. Nous voyons l'excellence du travail du décorateur (il s'appelle Allan Cameron), le sérieux papal des acteurs (Burton, dans son dernier rôle, émeut encore), la mise en place d'un “look” oscillant entre un docucu sur Londres bombardé et des réminiscences de la “Zone” du Stalker tarkovskien (un grand film, décidément). Nous remarquons que Radford (qui nous avait donné un beau film - Cœurs captifs - et dont le talent - fût-ce celui d'un premier assistant - n'est pas niable) a un goût pour la planche d'anatomie (Bacon sans les couleurs) et les nus d'académie.
De même, nous ne sommes pas surpris que la seule réussite du film soit d'ordre décoratif. Radford a trop “respecté” le livre et le public pour ne pas se trouver démuni toutes les fois qu'il s'est agi de faire avancer son récit dramatur-giquement. Quand on ne veut pas du tout “jouer” avec son public, on n'arrive même plus - c'est normal - à lui raconter une histoire. Ce qui était terrible dans les mots d'Orwell (le double-jeu d'O'Brien, la scène finale, les rats) devient seulement pénible dans les images de Radford. Un cinéaste, surtout lorsqu'il s'affronte à un “grand sujet”, c'est quand même quelqu'un qui allume un feu entre son film et nous. Pour nous réchauffer, pour jouer avec, pour mériter le risque de s'y brûler. Enlevez ce risque et le cinéma devient une pauvre chose. Décente et morte.
Dernière question: qu'est-ce que l'académisme anglais? Et pourquoi ces deux mots font-ils depuis toujours si bon ménage? Pourquoi le cinéma anglais est-il presque toujours décoratif, phobique, plat? Pourquoi Hitchcock est-il la seule exception (et même celui qui, pour ce qui est de jouer avec le public, en sait long)? Je hasarderai une hypothèse, cruelle. La voici. S'il y a un peuple, en Europe, mal armé, pour parler de l'intérieur d'un phénomène comme le totalitarisme, c'est bien le peuple anglais (Cromwell est mort en 1658).
C'est même pour cela qu'il est possible d'aimer l'Angleterre t que les plus beaux films anglais (ceux de Humphrey nnings, par exemple) sont ceux où l'on sent que la démo-atie, le sens civique, la résistance au délire ne sont pas de la frime. Bien sûr, ce sont presque des documentaires, car pour ce qui est des fictions “de deuil”, c'est d'Italie, d'Allemagne qu'elles sont venues, comme c'est d'URSS qu'on pourrait les attendre (passons sur la France collabo).
Le pays le plus étranger (“alien”) à la folie du tout, condamné au respect pincé de l'autre (“habeas corpus”), et à la politesse phobique (“I am afraid...”), est du même coup celui qui ne peut que fournir le cadre décoratif à ce qui fit délirer des peuples entiers, mais ailleurs, sur le continent.
Da Libération, 15 novembre 1984

Sei d'accordo con Serge Daney?
Vai alla home di MYmovies.it
Home | Cinema | Database | Film | Calendario Uscite | MYMOVIESLIVE | Dvd | Tv | Box Office | Prossimamente | Trailer | Colonne sonore | MYmovies Club
Copyright© 2000 - 2024 MYmovies.it® - Mo-Net s.r.l. Tutti i diritti riservati. È vietata la riproduzione anche parziale. P.IVA: 05056400483
Licenza Siae n. 2792/I/2742 - Credits | Contatti | Normativa sulla privacy | Termini e condizioni d'uso | Accedi | Registrati